Malgré l’accès des femmes à un plus grand nombre de postes de haute direction et la diminution de l'écart de rémunération entre les hommes et elles, il reste encore beaucoup de progrès à faire, particulièrement en ce qui concerne les femmes racisées. C’est là que le concept d’intersectionnalité prend toute son importance.
Au niveau de la haute direction, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon une étude de McKinsey publiée en 2019, aux États-Unis, environ 1 femme sur 5 occupe un poste de haute dirigeante mais cette proportion tombe à seulement 1 sur 25 pour les femmes racisées.
L’étude de McKinsey réalisée depuis maintenant 5 ans montre d’ailleurs que si la proportion de femmes occupant des postes de haute direction a augmenté légèrement ces dernières années, celle des femmes racisées n’a pas changé durant cette période.
Pour s’attaquer à ce problème de sous-représentativité, il est nécessaire d’être conscient des obstacles particuliers que les femmes racisées rencontrent au travail et de se pencher sur les raisons.
pourquoi encore une telle différence?
En fait, l’explication est relativement simple. Même si les femmes sont plus diplômées de l’université que les hommes, la discrimination existe bien envers les femmes et un moins grand nombre d’entre elles est embauché à des postes d'entrée dans les entreprises. Par conséquent, à chaque échelon supérieur, la représentation des femmes diminue encore.
Les femmes racisées subissent quant à elle une double discrimination. Bien que leur taux de diplomation soit sensiblement égal voir supérieur à celui de leurs homologues blanches, elles sont encore moins nombreuses à accéder aux postes d’entrée et par conséquent confrontées à une baisse de représentation plus marquée aux niveaux supérieurs.
Selon l’étude de McKinsey, les femmes rencontrent leur plus grand obstacle sur le chemin menant à des postes de haute direction au moment d’accéder à un poste de gestionnaire. En effet, pour 100 hommes promus à un poste de ce niveau, seulement 58 femmes noires et 68 femmes d'origine latino-américaine le sont. Bien évidemment, ces proportions diminuent au fur et à mesure qu’on accède aux échelons plus élevés.
Les femmes racisées doivent donc faire face à des enjeux encore plus grands que leurs homologues blanches, elles sont confrontées à davantage d'obstacles et à un cheminement plus compliqué vers le leadership, qui se caractérise par un soutien moindre de la part des dirigeants et un taux de promotion moins élevé (inférieur à 5 %).
Sans des changements fondamentaux, il apparaît donc extrêmement difficile de remédier à cette situation.
les solutions à envisager
sensibilisation
Avant même de penser à mettre en place des solutions, il faut que les employés soient conscients des problèmes d’inégalité qui frappent les femmes, et encore plus les femmes racisées en milieu de travail. En effet, les hommes et les femmes ont tendance à évaluer différemment la situation de ces dernières et les efforts en faveur de la diversité des sexes au travail. Puisque les hommes sont moins confrontés aux inégalités, ils ont la perception erronée que le lieu de travail est équitable alors que de leur côté, les femmes sont plus conscientes des disparités. Il est donc important de commencer par un travail de sensibilisation auprès du personnel masculin, avec des exemples concrets et des chiffres à l’appui pour illustrer la réalité et les différences qui existent et persistent.
engagement de la haute direction
L’engagement des hauts dirigeants d’une entreprise dans la diversité et l’inclusion est une condition indispensable pour faire évoluer les choses. En effet, ce sont eux qui décident des orientations stratégiques de l’organisation. Si la diversité fait partie de leurs priorités, ceci aura un effet domino sur le reste de l’organisation et contribuera à développer une culture d’entreprise inclusive pour l’ensemble du personnel. Les femmes racisées se sentiront ainsi respectées et auront le sentiment d’avoir accès aux mêmes chances que leurs collègues. De plus, une entreprise favorisant la diversité attirera inévitablement plus de candidates d’origines diverses.
approche personnalisée
Comme les femmes racisées font face à des enjeux spécifiques, plutôt qu’une solution ciblant toutes les femmes de la même façon, la mise en place d’une approche personnalisée, basée sur l’intersectionnalité, est nécessaire. Les femmes noires sont plus susceptibles de déclarer qu'elles n'ont jamais de contact avec des hauts dirigeants de leur entreprise, ce qui peut avoir une incidence direct sur leurs possibilités d'avancement. II semblerait opportun de créer et multiplier des occasions de rencontres et d’échanges entre ces groupes. Les gestionnaires ont un rôle important à jouer ici et peuvent favoriser le renforcement des relations professionnelles en offrant aux employées des possibilités d’interaction avec la direction de l’entreprise.
notion d’alliées
Les femmes qui parviennent à occuper des postes de haute direction devraient pouvoir devenir les alliées naturelles des autres femmes et faire résonner leurs voix. Les structures en place doivent permettre aux femmes d’agir comme des championnes de la solidarité féminine. Les entreprises sont appelées à jouer un rôle actif dans la promotion d’une multitude de voix féminines différentes, en particulier celles qui ne sont pas souvent entendues. Il est essentiel que les femmes au travail puissent compter sur des modèles qui leur ressemblent et reflètent leur réalité, sans quoi il leur sera très difficile de s’identifier.
pratiques de RH inclusives
Certains processus permettent aux organisations de renforcer les comportements et les façons de penser pour faire de l’inclusion une pratique qui va de soit. La présélection à l’aveugle des CV en est un bon exemple. Puisque l’on sait que les femmes racisées sont victimes d’une double discrimination à l’embauche, en supprimant toutes les informations personnelles des CV, on permet ainsi un processus de recrutement qui n’est pas biaisé ni influencé par certains éléments. Une autre bonne pratique peut consister à sensibiliser les responsables de l'embauche à l'importance de la diversité des expériences et des perspectives lors de l'examen de candidatures pour des embauches, des promotions et des ouvertures de postes de haute direction. La mise en place de ces différentes solutions permet de rendre l’inclusion plus intuitive et naturelle.
s’attaquer au problème dès la base
De nombreuses entreprises concentrent leurs efforts de promotion de la diversité principalement au niveau exécutif. Cependant, les organisations devraient se pencher sur le premier niveau de gestion, celui qui représente l’échelon problématique. Fixer des objectifs pour que davantage de femmes racisées accèdent à des postes de gestion de premier niveau permettrait notamment de s’attaquer au problème plus tôt dans leur cheminement de carrière. Également, en ayant dès le départ plus de femmes racisées qui occupent un poste d’entrée en entreprise, une plus grande proportion d’entre elles pourra accéder à des postes de gestion puis à des postes de haute direction.